Même si la crise de 2008, immobilière devenue financière, voire l’inverse selon les pays, n’a pas terriblement ébranlé le marché belge, elle n’est pas passée inaperçue.
Tout au long de la décennie 1997-2007, les prix de la brique bruxelloise ont énormément augmenté. Pour une maison d’habitation, on parlait d’une multiplication par 2,5, voire par 3. Pour un appartement ou pour une maison de rapport, c’était plus ou moins pareil.
A l’inverse, la décennie suivante, 2007-2017, brille par son extraordinaire stabilité : dans l’ensemble, les valeurs de l’immobilier résidentiel ont peu évolué, ce qui n’empêche pas de visualiser des hauts et des bas sur certains micromarchés.
Ce sont les géomètres-experts immobiliers bruxellois qui l’affirment au regard de leur baromètre annuel. Soit la globalisation des statistiques très rigoureuses et détaillées qu’ils récoltent lors de visites de biens mis en vente. Ils ne se suffisent en effet pas d’une localisation et d’un prix de vente, mais relèvent et traduisent en coefficients, tous ces éléments et critères qui font la valeur d’un bien : superficie, état général, qualité des finitions, types de chauffage, présence de jardin, cour, garage, infractions urbanistiques, etc.
Soit des coefficient qui, quels que soient le prix de vente du bien, sa localisation, son état…, leur permettent, en comparant toutes les données de chacune des ventes, de savoir très exactement si tel bien a obtenu un bon prix ou un prix surfait.
Les graphiques de la Commission du marché immobilier de l’Union des Géomètres-Experts de Bruxelles (Ugeb) sont très parlants : après une décennie marquée par un boom immobilier, il n’y a pas eu, depuis 10 ans, de très fortes oscillations. « Assurément en ventes publiques, note Eric De Keghel, président de ladite Commission. Au point qu’on est quasiment revenu, en 2017, aux prix de 2007. » « Il faut remonter aux années 80 pour trouver une aussi longue période de stabilité », renchérit Marc Dekeuleneer, son prédécesseur à la tête de la Commission, qui évoque notamment pour raison le maintien des taux d’intérêt hypothécaires au plancher.
Du côté des ventes de gré à gré, la dernière décennie accuse aussi une certaine stabilité, même si on peut repérer un palier en 2011 ou 2012. Ceci d’une manière générale.
Sur le segment des maisons d’habitation, en ventes publiques, l’indice moyen a crû de 4% entre 2016 et 2017, mais il est resté quasiment identique en ventes de gré à gré. « Sans doute dû au fait que l’échantillonnage en vente publique est plus étroit, note Marc Dekeuleneer. Pour peu que la qualité soit supérieure, l’indice augmente. »
« La disparité des valeurs n’en reste pas moins toujours importante entre les localisations les plus recherchées et les autres, ajoute Eric De Keghel. Les indices moyens de 2017 passent quasiment du simple au double entre le nord-ouest (Anderlecht, Molenbeek-Saint-Jean) et le sud-est (les deux Woluwe, Auderghem, Watermael-Boitsfort, ainsi que dans les beaux quartiers d’Ixelles, d’Etterbeek ou d’Uccle). »
La divergence des prix vaut aussi en termes de taille : les petites maisons sont proportionnellement bien plus chères que les grandes, même en étant attentif à ne cerner que le même type de produit, à savoir avec ou sans jardin, avec ou sans garage. « Question de performance énergétique, et des frais importants nécessaires pour l’améliorer, poursuit l’expert. Or, c’est un critère qui compte de plus en plus pour un acquéreur, même dans le cas de maisons 2 façades. »
En ventes publiques, le prix moyen d’un appartement acquis en 2017 a gagné 12% de plus qu’en 2016 à 1.760 euros/m². En ventes de gré à gré, il a pris 7% à 2.200 euros/m². « Jamais les prix n’ont été aussi élevés », indique Eric de Keghel qui met ce prix moyen en rapport avec celui du neuf qui démarre à 2 300 euros/m². Un sommet qui s’explique, bien sûr, par l’importance de la demande sur les appartements, mais aussi par la méthode de calcul.
Jusqu’il y a 4 ans, la Commission du marché immobilier de l’Ugeb se satisfaisait des valeurs moyennes au mètre carré. Depuis, elle a aussi, comme pour les maisons d’habitation et les maisons de rapport, transcrit le fruit de ses expertises en coefficients. « Ils sont peut-être moins parlants pour le grand public que le prix au mètre carré, convient Eric De Keghel, mais ils sont plus en accord avec la réalité du marché puisqu’ils tiennent compte de l’état du bien. »
Pour preuve, l’augmentation des prix repris en 2017 en tenant compte des coefficients n’est… que de 10,5 % en ventes publiques et de 3 % en ventes de gré à gré. « Cela veut dire que la qualité des appartements vendus s’est améliorée alors que le marché est resté assez stable. »
A noter qu’à l’instar des maisons d’habitation, la situation est un des principaux critères de prix. « Mais la taille joue aussi », ajoute l’expert. Et de désigner les prix forts, d’une part, des petits appartements, d’autre part, de ceux comptant plus de 4 chambres. Selon lui, « il ne faut pas y voir l’impact annoncé du nouveau bail de colocation créé par la Région bruxelloise qui sécurise ce type de location, mais plutôt le fait que les grands appartements sont généralement rares et exceptionnels. »
Vu la rareté de ce type de produit sur le marché, tant des ventes de gré à gré que des ventes publiques, le segment des maisons de rapport est assurément complexe à étudier. Avec ceci que, nombre d’entre elles – mais pas toutes, ce qui complique l’obtention de moyennes correctes – sont grevées d’infractions urbanistiques (affectations, présences d’annexes…). « Il est également compliqué à analyser du fait qu’il y a plus de maisons de rapport dans les situations défavorisées tandis que les quartiers mieux situés comportent généralement plus de maisons unifamiliales. » En ventes publiques, leur prix a explosé de 11 %, mais de 4,5 % en gré à gré. « Les valeurs 2017 sont néanmoins comparables à celles d’il y a 10 ans, » conclut Eric De Keghel.
En 2018, le Belge a dépensé, en moyenne, 251.584 euros pour une maison. Cela représente une augmentation non négligeable de + 4,7% par rapport à 2017. En tenant compte de l’inflation (+ 2,2% en 2018), l’augmentation s’élève à + 2,5%. « Il s’agit de la première croissance significative en cinq ans », déclare le notaire Renaud Grégoire, porte-parole de Notaire.be, à l’origine desdits chiffres.
Augmentation substantielle, certes, mais variable selon les régions. Et c’est dans la capitale que les candidats acheteurs trinquent le plus : l’augmentation constatée y est d’un peu plus de + 5% et le prix moyen y dépasse pour la première fois la barre symbolique des… 450.000 euros.
En Flandre, le prix moyen est de 277.304 euros (+ 3,8% par rapport à 2017). En Wallonie, le prix moyen s’élève à 189.257 euros, soit presque 90.000 euros de moins qu’en Flandre. Le sud du pays n’est toutefois pas épargné par le phénomène haussier : le prix moyen grimpe de + 3,7% par rapport à 2017.
Le prix varie donc considérablement d’une province à l’autre. Le prix le plus bas, soit 153 890 €, concerne le Hainaut (où l’augmentation est pourtant forte, lire plus bas), et le prix le plus élevé est de 452.721 € dans la région de Bruxelles-Capitale. 300.000 € d’écart pour des biens sis à quelques dizaines de kilomètres !
La province du Hainaut se caractérise par l’augmentation la plus importante, soit + 6,2% (prix de 153.890 euros). Le Brabant wallon affiche l’augmentation la plus faible, soit +2,5% (323.304 euros).
Les prix ont aussi augmenté à Namur (+2,9% 192.783 euros), à Liège (+4% 181.852 euros).
Le prix de l’appart’ est, lui aussi, en hausse en 2018 : il s’établit en moyenne à 220.095 euros, soit une augmentation de + 1,8% par rapport à 2017. Si l’on tient compte de l’inflation, en revanche, il y a lieu de parler de diminution de prix.
Les disparités régionales sont moins fortes pour les appartements que pour les maisons : en Wallonie le prix a augmenté de + 0,5% et atteint 174.410 euros ; à Bruxelles de + 2,4% (240.250 euros) et en Flandre de + 1,6% (224.331 euros).
« Les acheteurs restent davantage intéressés par des appartements neufs et négocient davantage le prix demandé à l’origine pour les appartements existants, en regard des coûts de rénovation et des charges liés », explique Renaud Grégoire.
L’acquéreur paye désormais 20.000 euros de plus qu’en 2014… Si on tient compte de l’inflation (+ 7% au cours des cinq dernières années), la valeur réelle des appartements a augmenté de + 3% au cours des cinq dernières années.
La Libre Immo est le supplément immobilier de La Libre Belgique, distribué tous les jeudis avec le quotidien "La Libre Belgique".