Où acheter un bien que l’on souhaite louer ?

Marché immobilier
Où acheter un bien que l’on souhaite louer ?

Quels sont les éléments qui font le succès d’un marché locatif ?

Qui n’a jamais regretté de n’avoir pas su flairer la bonne affaire ? D’avoir manqué l’occasion d’acheter un bien immobilier dans un quartier hier délaissé et aujourd’hui devenu branché. Adieu veau, vache, cochon, plus-values monstres et rendements locatifs confortables…
Et s’il existait des indices, des éléments qui permettent à ceux qui les débusquent de devancer les modes et d’acheter au bon endroit, au bon moment ? En d’autres termes, quels sont les facteurs qui conditionnent le succès d’un marché locatif, et donc, celui d’un investissement immobilier ?

L’une des pistes de réponse serait de suivre à la trace les agissements des professionnels du métier. En se renseignant sur les projets immobiliers à venir, le candidat-investisseur aura tôt fait de jeter son dévolu sur leurs environs directs. Le renouveau et la popularité sont contagieux en immobilier, et l’engouement suscité par une nouvelle promotion se propage généralement aux rues avoisinantes, voire, pour les plus chanceux, à tout le quartier. Cela vaut pour un projet d’un ou plusieurs immeubles à appartements, mais aussi pour un complexe de bureaux ou un centre commercial, par exemple. « Le succès attire le succès, c’est évident », acquiesce Jean Houtart, administrateur délégué du réseau Les Viviers Properties, dont les quatre agences immobilières sont réparties entre Bruxelles et Namur. « D’autant que c’est souvent rassurant de voir que des grands acteurs comme des autorités communales ou des promoteurs investissent en quantité. Il y a lieu de penser qu’ils savent ce qu’ils font, études à la clé. »

La rénovation urbaine, le bon filon

L’hypothèse se vérifie d’autant plus que les projets immobiliers ciblent un centre-ville. Mieux encore, un centre-ville en proie à une vaste opération de rénovation urbaine. Ainsi, par exemple, du quartier des Guillemins, à Liège, qui a bénéficié d’une aura nouvelle grâce à la construction de la gare de Calatrava et à la venue de la Médiacité. Tour des Finances, passerelle cylo-piétonne de la Boverie, projet mixte de bureaux et logements Paradis Express… : on ne compte plus les investissements – privés comme publics – reboostant le quartier ces dernières années. « Il y a clairement un effet progressif d’amélioration du quartier, et on n’en est encore qu’aux prémisses », abonde Eric Verlinden, patron du réseau d’agences Trevi, dont les 35 agences quadrillent tout le pays. Conséquence, les particuliers n’ont pas tardé à embrayer et à se précipiter sur les biens résidentiels environnants, persuadés de la plus-value à gagner à la revente ou, dans le cas d’un investissement sur le long terme, de l’afflux certains de candidats-locataires. Le même scénario s’est répété autour du nouveau shopping Rive gauche, inauguré en mars 2017 en plein cœur de Charleroi.
« Oui, mais encore faut-il s’assurer que ces professionnels qui livrent un projet majeur ne se sont pas trompés… », glisse Patrick Balcaen, directeur de l’agence Immo Balcaen, sise à Jette, au nord de la capitale. « Ou que le projet en question s’inscrit dans un tissu urbain propice au renouveau. Quand on observe le centre commercial Docks Bruxsel et que l’on se rend compte à quel point il est engoncé entre des zones industrielles, le Canal et des axes de communication importants, on ne voit pas comment un quelconque engouement pourrait se communiquer alentour. » Pas dans un premier temps, à tout le moins. Car, dès la genèse du projet de shopping center, une réflexion sur le développement d’un quartier résidentiel mixte destiné à sortir de terre à l’arrière de Docks a été initiée.

Écoles, hôpitaux et institutions

Parmi les autres éléments qui pèsent sur la réussite d’un investissement immobilier, on peut également citer le voisinage d’une Haute école ou d’une université. Lesquels s’accompagnent de leur lot d’étudiants, chercheurs, professeurs… Soit des candidats-locataires de choix, qui concluent des baux suivant une rotation régulière. A titre d’exemple, le campus du Sart-Tilman, à Liège, a stimulé le développement de plusieurs projets immobiliers : des résidences étudiantes, bien sûr, mais pas seulement puisque Thomas&Piron y a également porté un projet d’écoquartier. « Une fois encore, la formule ne fait pas toujours ses preuves », nuance Patrick Balcaen, épinglant le cas de l’école britannique de Tervueren (British School of Brussels). Edifiée en 1969, elle n’a pas retenu l’attention des promoteurs, pas plus qu’elle n’a déclenché l’envie, parmi les eurocrates qui y ont inscrits leurs enfants, de louer un bien dans ses environs. « Des bus scolaires y font la navette pour relier le sud-est de la capitale à Tervueren. »
Outre les établissements scolaires, un complexe hospitalier ou le siège d’une institution importante – le Shape, à Mons, pour ne citer que lui, sont également des signes avant-coureurs du développement d’un quartier résidentiel, et avec lui, d’un marché locatif prospère.

Témérité et patience

Enfin, le privé n’est pas le seul à gagner à être pisté. Le secteur public peut lui aussi faire office de précurseur en investissant massivement pour le renouveau d’un quartier : mobilité (nouvelle ligne de métro, de tram ou de… RER), grands travaux routiers, réhabilitation d’une zone stratégique, travail sur les espaces publics… Une fois de plus, ces investissements seront d’autant plus décisifs que le quartier en question est tombé en désuétude ou en souffrance. « A ce titre », reprend Eric Verlinden, « le futur piétonnier du centre-ville bruxellois ne manquera pas d’impacter positivement son immobilier. Et d’apporter dans la foulée son lot d’investisseurs et, de facto, de locataires. »
Faut-il rappeler, toutefois, que la règle d’or de tout investissement immobilier est de s’armer de patience. Rome ne s’est pas faite en un jour, et un quartier digne de ce nom, vivant et riche en services comme en facilités se construit d’année en année. Toute prise de valeur se mérite, ce qui signifie qu’il vaut mieux avoir les reins solides pour permettre à son investissement de fleurir avec les ans. A défaut, l’investisseur moins téméraire choisira une situation plus sûre. Mais sans doute moins rentable à terme.

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Le retour à la ville est synonymes d’affaires à faire

 

D’après Eric Verlinden, administrateur délégué du réseau d’agences immobilières Trevi, « la santé du marché locatif dépend de la situation économique globale et de l’accessibilité au logement. » Ce qui signifie, d’une part, que le nombre de prises en location de biens résidentiels dans un endroit donné est conditionné par la croissance de l’emploi au sein de ladite zone – ce sont, en effet, les offres d’emploi qui attirent les ménages dans un quartier. Et d’autre part, que la courbe d’évolution du prix de l’immobilier est directement proportionnelle à celles du nombre de propriétaires-occupants (qui peuvent s’offrir un bien) et de locataires (qui n’ont pas les moyens de le faire). Bien sûr, d’autres éléments sont aussi décisifs, ajoute le patron de Trevi, sociologiques notamment. « Ainsi du retour à la ville, par exemple, qui amène les gens à quitter les zones plus reculées pour se regrouper dans des centres-villes de plus en plus agréables. Niveaux de prix obligent, tous ne parviendront pas à accéder à la propriété et viendront grossir les rangs des locataires. »

 

Prix volatils, loyers stables

Reste que, en matière de prix, « la loi du marché locatif n’est pas celle du marché acquisitif« , fait remarquer Eric Verlinden. « Il est intéressant de constater que ces 4, 5 dernières années, à l’inverse du prix d’achat des biens qui a augmenté drastiquement, les loyers n’ont pas tellement bougé. » Pourquoi ? « Parce que le marché locatif dépend davantage encore que le marché acquisitif de la loi de l’offre et de la demande. Or, du fait de l’impact très important d’investisseurs sur le marché, l’offre locative a été suffisante pour absorber la demande. Il n’y a donc aucune raison que le prix des loyers soit en hausse« , assure le patron de Trevi. « Les rangs des locataires ont gonflé à Bruxelles et en Wallonie depuis 4, 5 ans, mais ceux des investisseurs désireux d’acquérir des biens pour les mettre en location aussi. L’équilibre est là, et les loyers ne s’en sont donc pas ressentis, contrairement à la valeur vénale des biens, sous pression. »

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Créer un écosystème, la clé du succès locatif d’un projet immobilier 

 

« Ce qui me frappe, c’est d’observer à quel point le besoin de vivre dans un quartier qui concentre diverses facilités vaut pour tous les locataires, quel que soit leur âge et la composition de leur ménage« , observe Denis Latour, administrateur délégué de l’agence Latour&Petit, qui compte trois bureaux, deux à Bruxelles (Woluwe-Saint-Lambert) et un à Namur. Et d’étayer son propos en épinglant le cas du quartier du Wolubilis, à proximité de ses agences de la capitale, à proximité immédiate du Woluwe Shopping Center. « Il y a 10 ans, c’était presque un terrain vague et aujourd’hui son succès est incontestable car il concentre un centre culturel (le Wolubilis), de l’Horeca (le Cook&Book), des activités sportives (dans des espaces sis au-dessus du Cook&Book), des transports en commun (métro…), une place publique où les enfants peuvent jouer en sécurité, un centre commercial et de l’habitat, dont un grand nombre d’appartements mis en location. » Denis Latour prend entre autres l’exemple de l’ensemble résidentiel des Marquises, qui comprend quelque 80 unités. Inauguré voici une dizaine d’années (2007), il a été la cible d’investisseurs avisés qui se sont littéralement jetés dessus. « L’ensemble forme un projet de quartier qui plaît au plus grand nombre, jeunes couples, familles et personnes âgées« , remarque-t-il. « Ce que tous les locataires recherchent, c’est la proximité des services et des facilités, et donc, la possibilité de tout faire à pied ou en vélo. La clé du succès d’un quartier c’est de recréer un centre-ville à petite échelle en son sein. »

Services, facilités et proximité

L’exemple des Marquises n’est pas l’apanage de la capitale. De nombreux projets immobiliers ont misé sur cette tendance de l’écosystème et ont remporté un franc succès, y compris dans des régions plus… reculées, sourit le patron de Latour&Petit. C’est le cas de Namur, pour ne citer qu’elle, où le succès du plateau d’Erpent, l’une des entités qui compte la commune, est parlant. « Le quartier des Jardins de Baseilles, en bordure de la N4, allie maisons, appartements, mais aussi commerces et Horeca, le tout à distance raisonnable du centre-ville namurois. Tous les ingrédients sont réunis. » Le projet n’est pas le seul à tirer parti du haut potentiel d’Erpent, d’autres ont embrayé et se sont vus aussi récompensés par une belle réussite commerciale.

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Certains quartiers sont d’éternels mal-aimés

« Certains quartiers ont la poisse », déplore Patrick Balcaen (Immo Balcaen). « Beaucoup de nos clients nous demandent expressément de ne pas leur présenter des biens situés à Molenbeek-Saint-Jean, par exemple. C’est une question de réputation, qui n’est pas près de changer. »

Le coup de pouce de l’investissement

Eric Verlinden (Trevi) distingue pour sa part les quartiers « en mutation« , qu’il oppose aux quartiers « stabilisés« . Lesquels étant ceux qui, au sens du patron du réseau d’agences, ont « trouvé leur public » : le centre de Wavre, par exemple, le quartier Lepoutre (Ixelles) ou encore celui du Clos des Trois Couleurs à Woluwe-Saint-Pierre. « Les quartiers en mutation doivent évoluer sous l’action des pouvoirs publics », souligne-t-il. « Le secteur privé peut aussi donner des impulsions à coups de projets, qui auront d’autant plus d’effet si elles bénéficient d’un soutien public (voiries, espaces publics, transports en commun…). » C’est l’investissement qui fait office de moteur, insiste Eric Verlinden.

Avec ceci que, pour la plupart d’entre eux, ces changements s’effectuent à un rythme extrêmement lent, qui se comptent en années, parfois en… dizaines d’années. « Tout cela prend énormément de temps », assure le patron de Trevi. « On parle du renouveau du Canal depuis au moins 20 ans et les premiers projets émergent seulement; on promet celui de Dansaert depuis les années 90 et il n’est pas encore arrivé à maturité… » « Un des plus beaux exemples de réhabilitation récente à Bruxelles est celle du site de Tour&Taxis« , renchérit Patrick Balcaen. « Les bureaux et les espaces d’exposition qui y ont été installés fonctionnent bien, tout un quartier s’apprête à naître à l’arrière, mais pour le reste… Quand le projet est sorti de terre, on nous a dit que l’essor du quartier n’allait pas tarder, que des magasins de proximité allaient s’y installer, que les locataires seraient au rendez-vous. Je ne vois encore rien venir… L’offre est abondante mais les gens ne sont pas demandeurs d’y habiter et, une fois passée l’heure d’ouverture des bureaux, le site s’apparente à une forteresse, fermé sur lui-même et déconnecté du quartier. »

Éternelle inertie

Si ce n’est, reprend Eric Verlinden, que les efforts de revalorisation d’un quartier ne se concluent pas toujours sur une note positive. « Il y a un quartier à côté de la Porte d’Anderlecht qui fait du sur place, malgré plusieurs initiatives publiques. Cela fait 10-15 ans qu’il n’évolue pas, alors que d’autres zones voisines – à l’image, par exemple, de tout le côté intérieur de la petite ceinture, par exemple – renaissent autour de lui au gré de la livraison de projets immobiliers. La valeur des biens y est autrement plus haute. Pourquoi ? On ne se l’explique pas. »

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Vers une communauté de locataires, aux exigences… partagées

Chez nous, la plupart des locataires de biens immobiliers ne sont pas particulièrement difficiles. Que les candidats à l’investissement en bon père de famille se rassurent, leurs exigences les plus pointues se résument bien souvent à l’aménagement d’un local ou d’une petite place dans le hall d’entrée d’un immeuble pour y caser une poussette d’enfant ou un vélo. Voire tout au plus prétendent-ils à une cuisine ou une salle de bain un tantinet plus… up-to-date.

Un service, plusieurs utilisateurs

Pourtant, quelques professionnels de la brique ont récemment choisi de s’inscrire dans le sillage de ce qui se fait à l’étranger ; et en particulier dans les pays anglo-saxons, où l’immobilier est tellement cher qu’il s’accompagne d’attentes plus importantes en termes de confort et de services aux locataires. De nombreux promoteurs et quelques agents immobiliers relayent ainsi l’existence d’une série d’aménagements, dont certains sont encore novateurs pour le marché belge : local vélos, buanderie et espaces de détente communs pour les grands ensembles… Mais, surtout, un haut degré d’exigence en matière de gestion locative : disponibilité au-delà des horaires de bureau, rapidité d’intervention en matière de problèmes techniques… Certains de ces équipements et services sont déjà testés dans certains projets immobiliers – pensés pour des étudiants ou des jeunes travailleurs pour la plupart. Tandis que, en parallèle, la profession de gestionnaire locatif s’est étoffée et professionnalisée au fil des ans.

Il y a toutefois lieu de s’interroger, dans la foulée de l’essor de l’économie participative et du phénomène d’ »uberisation » de la société, sur la question du partage de ces services et équipements entre les locataires, les utilisateurs finaux. « On n’y est pas encore, mais il y a lieu d’envisager cette éventualité« , indique Patrick Balcaen (Immo Balcaen). « Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que le statut du locataire évolue. »

Preuve en est, continue le courtier, le fait que, dans le milieu, on identifie de plus en plus les locataires en utilisant le terme de communauté, auquel on oppose celle des propriétaires. Et pour cause, les droits et les devoirs des premiers comme des seconds s’étoffent, à tout le moins se précisent et se réglementent, ce qui les pousse à se rassembler sous une même bannière pour mieux défendre leurs intérêts. « De là, naît un esprit de groupe susceptible de faire évoluer les mentalités et, in fine, le marché locatif« , souligne Patrick Balcaen. Qui ajoute qu’il ne faut pas diaboliser ces nouveaux services et équipements en les assimilant à une machinerie lourde et compliquée. « Le principal, c’est que les locataires se sentent pris en considération mais aussi que les besoins dont ils font écho puissent être entendus et, dans la mesure du possible, trouver une réponse.«